29 juillet 2009
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Extrait d’un entretien avec Jean Luc Godard paru aux Inrocks sous la plume d’un gardien du temple : Serge Kaganski
Godard avec ses phrases couperets, ses erreurs volontaires à la manière d'un artiste du collage, il démonte « une certaine qualité internationale » celle qui truste les festivals over the world en mixant malicieusement des gars aussi « différents « que Gus Van Sant et Abbas Kiarostami.
Il y a donc de bons Américains...
Oui, Manny Farber, c'est un bon Américain. Il y en a d'autres. Mais je ne tiens pas spécialement à critiquer le cinéma américain. D'autant plus qu'il existe aussi une "qualité internationale", où tout se ressemble. Ce sont les films qu'on présente dans les festivals comme Cannes. Les films de Kiarostami, Gus Van Sant, Elia Suleiman... C'est une idée assez commune du cinéma d'art. Je vois ça très bien avec mon prof de tennis. Il n'ira jamais voir un film de Luc Moullet, dont il ne connaît même pas le nom, mais il va voir Elephant. Ça correspond à l'idée qu'il se fait du grand art.
Est-ce que le fait qu'un film séduise votre prof de tennis est vraiment disqualifiant pour le film ?
Ce n'est évidemment pas ce que je veux dire. Ce garçon ne va d'ailleurs pas non plus voir mes films. Il me connaît, a envie de me parler et passe par-dessus le filet tout le temps pour bavarder. A tel point que je suis obligé de le menacer de ne plus le payer s'il enjambe le filet, parce que pendant qu'il me fait la conversation, me parle des films qu'il va voir, il ne m'apprend plus à jouer au tennis.
Et en quoi, Kiarostami et Van Sant, est-ce la même chose ?
En tout cas, ça l'est devenu. Gus Van Sant n'a jamais fait un film aussi beau que Et la vie continue. Mais Ten ou Elephant, c'est la même chose. Du cinéma intellectuel, où tout pourrait se formuler par de la parole. C'est des mots. Pour faire ça, il n'y a pas besoin de caméra. Dans le gros cinéma hollywoodien commercial, il n'y a pas besoin de caméra, mais il y a une telle puissance de feu comme disait Staline : "A force de quantité, on finit par écraser la qualité" que ça produit quelque chose. Je vais voir ces films, j'arrive à les oublier tout de suite, ou alors je n'y arrive pas et je m'en veux. Mais pour revenir à Ten et Elephant, je dirais que c'est du sous-Antonioni. Antonioni est le cinéaste qui a le plus influencé le cinéma contemporain, et cette influence est délétère. On a l'influence qu'on peut. Paradjanov par contre n'a pas beaucoup d'influence aujourd'hui et c'est dommage.
Mais la phrase la plus importante demeure celle-ci : "Antonioni est le cinéaste qui a le plus influencé le cinéma contemporain et cette influence est déletère ." terme qu'on peut remplacer par « toxique ». en somme , Godard accuse les cinéastes de la qualité internationale tant appreciée des carnavals de cinéma de se vautrer dans du sous Antonioni , et cette musique contemplative si insistante qui repose sur un rapport particulier à la durée (par musique j'entends composition ) , semble nous dire Godard, n’est pas très pertinente en soi dans le cinéma de ce début du 21e siècle
affaire à suivre...